Aux Premiers et Premières Ministres du Canada
- L'hon. François Legault, premier ministre du Québec
- L'hon. Doug Ford, premier ministre de l'Ontario
- L'hon. Dennis King, premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard
- L'hon. Tim Houston, premier ministre de la Nouvelle-Écosse
- L'hon. Susan Holt, première ministre du Nouveau-Brunswick
- L'hon. Wab Kinew, premier ministre du Manitoba
- L'hon. David Eby, premier ministre de la Colombie-Britannique
- L'hon. Scott Moe, premier ministre de la Saskatchewan
- L'hon. Danielle Smith, première ministre de l'Alberta
- L'hon. Andrew Furey, premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador
- L'hon. R.J. Simpson, premier ministre des Territoires du Nord-Ouest
- L'hon. Ranj Pillai, premier ministre du Yukon
- L'hon. P.J. Akeeagok, premier ministre du Nunavut
Mesdames les Premières Ministres et Messieurs les Premiers Ministres,
Je vous écris aujourd'hui pour vous demander à nouveau à ce que chacun et chacune de vous s'engage à respecter et protéger les droits fondamentaux des personnes en situation d'itinérance et qui vivent dans des campements.
Alors que les administrations de tout le pays commencent à recevoir des fonds fédéraux pour remédier aux campements et à l'itinérance hors refuge, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont un rôle essentiel à jouer pour garantir que cet argent changera durablement les choses dans les communautés ciblées.
Par ailleurs, ma lettre vous parvient exactement un an après la publication de Respect de la dignité et les droits de la personne : Examen des campements de personnes en situation d'itinérance de la défenseure fédérale du logement, le premier examen national qui a requis la participation directe des personnes vivant dans des campements et des principales parties prenantes.
Grâce à des consultations menées auprès de plus de 300 personnes vivant dans des campements, de défenseurs locaux, de dirigeants autochtones et d'administrations municipales, le rapport a fourni des solutions fondées sur les droits de la personne à tous les ordres de gouvernement. Ces recommandations sont encore des outils essentiels pour obtenir des résultats durables. Dans ce rapport, j'ai aussi recommandé une collaboration plus étroite entre l'ensemble des gouvernements et administrations municipales et une participation active des dirigeants autochtones.
Les conclusions de mon rapport ont servi de base à la décision du gouvernement fédéral d'allouer 250 millions de dollars, conformément au budget de 2024, pour régler la question des campements. Appelé l'Initiative de lutte contre l'itinérance hors refuge et les campements, le programme est destiné à être égalé par les provinces, les territoires et les municipalités. Il privilégie les plans d'action qui sont fondés sur les droits de la personne et axés sur la communauté.
Ces nouvelles ressources financières représentent une possibilité de vraiment améliorer la qualité de vie des personnes vivant dans des campements et de leur fournir un logement adéquat. Tout le monde est d'accord pour dire que les campements ne constituent pas des solutions acceptables à la crise actuelle du logement et de l'itinérance. Nous devons faire en sorte que chaque personne ait accès à un logement permanent, abordable et adéquat. Pendant que nous travaillons à réaliser cet objectif pour tout le monde, il faut de toute urgence protéger la vie, la dignité et les droits de la personne de tous ceux et celles qui vivent dans des campements en ce moment.
À mesure que ce financement se déploie, chacun et chacune de vous au sein de votre administration provinciale ou territoriale auront un rôle important à jouer. Cependant, l'argent n'est pas un gage de succès. Je tiens à souligner qu'une approche fondée sur les droits de la personne est la meilleure façon de régler la question des campements. Une telle approche met les personnes en situation d'itinérance au centre de nos efforts visant à trouver des solutions efficaces.
C'est pour cette raison que je demande aux premières ministres et premiers ministres des provinces et des territoires de collaborer avec les municipalités ciblées pour veiller à ce que les plans d'action communautaires soient conçus selon une approche fondée sur les droits de la personne grâce à ce qui suit :
- des engagements explicites en faveur des droits de la personne et l'utilisation d'un langage cohérent en matière de droits de la personne de la part de l'ensemble des dirigeants politiques
- des mesures urgentes pour protéger la vie, la dignité et les droits de la personne de ceux et celles qui vivent dans des campements
- un engagement à abroger les lois et les règlements qui contribuent à la criminalisation et à l'insécurité des personnes vivant dans des campements
- un engagement sérieux des gouvernements et organisations autochtones
- un engagement sérieux des personnes vivant dans des campements
L'examen que j'ai mené et mes constantes prises de contact auprès des personnes vivant dans des campements m'ont convaincue que ces personnes sont les mieux placées pour savoir quelles solutions leur permettraient d'être logées convenablement. Elles sont expertes de leur propre vie.
Ce que j'ai appris en parlant avec les personnes vivant dans des campements, c'est que leurs droits de la personne fondamentaux ne sont pas respectés. Sans les nécessités de la vie, elles luttent chaque jour pour survivre. Elles n'ont pas d'eau potable, de nourriture, d'installations sanitaires, de chauffage et de climatisation, ni les services nécessaires pour protéger leur santé physique et mentale. Elles m'ont dit que les campements existent parce qu'il y a un manque systémique et plus grande ampleur de respect du droit à un logement adéquat – elles sont confrontées à un manque de logements abordables, à des services de soutien limités et à l'impossibilité de trouver un autre endroit sûr ou permanent où aller.
La voie à suivre exige une participation active des personnes vivant dans des campements aux décisions qui les concernent, le respect de leurs droits et des solutions permanentes en matière de logement. Les mesures coercitives et les démantèlements de campements déstabilisent les gens, causent des préjudices supplémentaires et ne s'attaquent pas aux causes profondes des campements. Au contraire, une participation active consiste à instaurer et à maintenir la confiance. Quand on s'y prend bien, on obtient de bonnes solutions qui donnent de bons résultats – au lieu de solutions insuffisantes qui font perdre du temps et des fonds publics et qui nuisent encore davantage aux personnes concernées.
Pour mettre fin à l'itinérance, nous devons absolument travailler ensemble, main dans la main. Une fois de plus, je vous demande aujourd'hui de vous engager à respecter et à protéger les droits de la personne fondamentaux des personnes vivant dans des campements et des personnes en situation d'itinérance. Nous avons besoin de votre leadership.
Dans le cadre de mes fonctions en vertu du paragraphe 13a) de la Loi sur la stratégie nationale sur le logement, je continuerai de surveiller la mise en œuvre de cette initiative et d'évaluer ses effets sur les personnes appartenant à des groupes vulnérables, éprouvant des besoins en matière de logement ou vivant en situation d'itinérance. Je fais parvenir une copie de ma lettre aux commissions des droits de la personne des provinces et territoires parce qu'elles sont des mécanismes essentiels de la reddition de comptes concernant les droits de la personne.
Je souhaite avoir l'occasion de vous rencontrer, y compris à l'occasion d'une réunion du Conseil de la fédération, afin de discuter d'une réponse nationale à la crise de l'itinérance.
Je vous prie d'agréer, Mesdames les Premières Ministres et Messieurs les Premiers Ministres, mes salutations distinguées,
Marie-Josée Houle
Défenseure fédérale du logement
c.c.:
- L'hon. Nathaniel Erskine-Smith, C.P., député, Ministre du Logement, de l'Infrastructure et des Collectivités
- Philippe-André Tessier, président, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec
- Kathryn Oviatt, K.C., chef de la Commission et des tribunaux, Commission des droits de la personne de l'Alberta
- Kasari Govender, commissaire des droits de la personne, Bureau du commissaire des droits de la personne de la Colombie-Britannique
- Laurie Bonten, présidente, Commission des droits de la personne du Manitoba
- Phylomène Zangio, présidente, Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswick
- Dre Smita Joshi, présidente, Commission des droits de la personne de Terre-Neuve-et-Labrador
- Charles Dent, président, Commission des droits de la personne des Territoires du Nord-Ouest
- Cynthia Dorrington, présidente, Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse
- Patricia DeGuire, présidente de la Commission ontarienne des droits de la personne
- Joanne Ings, présidente, Commission des droits de la personne de l'Île-du-Prince-Édouard
- Treena Sikora, présidente, Commission des droits de la personne de la Saskatchewan
- Michael Dougherty, président, Commission des droits de la personne du Yukon