Mémoire de la Commission canadienne des droits de la personne sur le projet de règlement sur la Prestation canadienne pour les personnes handicapées


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Introduction

La Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) est l'institution nationale des droits de la personne au Canada. Notre rôle est donc de protéger et de promouvoir les droits de la personne, et d'en surveiller le respect, au Canada. La Commission est également chargée de surveiller la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) par le Canada.

En 2023, la CCDP a célébré l'adoption de la Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées (Loi sur la PCPH). Cette avancée monumentale promettait de sortir les personnes en situation de handicap du Canada de la pauvreté et d'améliorer leur qualité de vie. Nous craignons toutefois que les modalités de ce nouveau programme, telles qu'elles sont décrites dans le projet de règlement sur la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, ne permettent pas de tenir cette promesse.

La CCDP se réjouit de l'occasion qui lui est donnée de commenter ce projet de règlement. Nous encourageons vivement le gouvernement à bonifier la Prestation canadienne pour les personnes handicapées (PCPH) et à lancer la mise en œuvre ce programme essentiel dès que possible. La PCPH doit veiller à ce que toutes les personnes en situation de handicap au Canada aient un niveau de vie adéquat et puissent vivre dans la dignité.

Commentaires généraux : Obstacles liés au processus de consultation

  • Enjeu : La CCDP reconnaît les efforts du gouvernement pour rendre ce processus de consultation accessible. Toutefois, nous craignons que des obstacles empêchent encore certaines personnes en situation de handicap de participer à cette consultation. Par exemple, le format des consultations (c.-à-d. l'insertion de commentaires dans des zones de texte sur la page Web de la Gazette du Canada) pourrait ne pas être accessible à tous et toutes. Le projet de règlement et le résumé de l'étude d'impact de la réglementation (« étude d'impact ») sont également rédigés dans un langage technique qui pourrait être difficile à comprendre pour certaines personnes.
  • Recommandations :
    • Le gouvernement devrait rendre ses consultations entièrement accessibles aux personnes en situation de handicap. Par exemple, nous recommandons de fournir des informations sur le projet de règlement en langage clair, d'indiquer comment demander le projet de règlement dans des formats de substitution et d'ajouter une table des matières à l'analyse d'impact pour faciliter la navigation dans le texte long.
    • Dans son prochain rapport au Parlement sur la manière dont il a consulté les personnes en situation de handicap lors de l'élaboration du règlement, le gouvernement devrait expliquer comment il compte s'y prendre pour améliorer l'accessibilité des futures consultations.

Objectif

  • Enjeu : L'objectif du projet de règlement est de « réduire la pauvreté et de renforcer la sécurité financière » des personnes en situation de handicap. Bien qu'il s'agisse d'un pas en avant, le gouvernement a la possibilité d'harmoniser les objectifs de la PCPH sur ses engagements internationaux en matière de droits de la personne. Par exemple, l'article 28 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) et l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) imposent au Canada de veiller à ce que les personnes en situation de handicap et leurs familles aient un niveau de vie adéquat. Ces articles reconnaissent également le droit des personnes à « l'amélioration continue de leurs conditions de vie ».
  • Recommandations :
    • L'objectif du projet de règlement devrait être renforcé afin qu'il soit conforme aux engagements du Canada en vertu du droit international. Le règlement devrait viser à garantir à toutes les personnes en situation de handicap au Canada un niveau de vie adéquat et leur permettre de vivre dans la dignité.
    • Le montant de la PCPH et les critères d'admissibilité devraient être considérablement élargis pour atteindre cet objectif. Nous fournissons des recommandations à ce sujet ci-dessous.

Critères d'admissibilité

Utilisation du crédit d'impôt pour personnes handicapées

  • Enjeu : La section 2(1)(b) du projet de règlement exigerait que les personnes soient admissibles au crédit d'impôt pour personnes handicapées (CIPH) afin d'accéder à la PCPH. La CCDP est préoccupée par le fait que de nombreuses personnes en situation de handicap sont exclues du CIPH et que de nombreuses personnes se heurtent à des obstacles pour accéder à ce programme. Par exemple :
    • Le taux d'utilisation du crédit d'impôt pour personnes handicapées est très faible (estimé à 40 % des adultes en âge de travailler et présentant des handicaps admissibles), malgré le taux de pauvreté stupéfiant des personnes en situation de handicap au Canada.
    • Certains types de handicaps ne sont pas reconnus ou ne donnent pas droit au CIPH (p. ex., les handicaps liés à la douleur et les handicaps épisodiques).
    • Le CIPH n'est pas remboursable. Les personnes ne bénéficient du CIPH que si leurs revenus sont suffisamment élevés pour qu'elles paient des impôts. De nombreuses personnes en situation de handicap vivent sous ce seuil de revenu et ne bénéficient donc pas du CIPH.
    • De nombreuses personnes se heurtent à des obstacles lorsqu'elles demandent à bénéficier du CIPH. Elles ont du mal à comprendre le processus de demande et n'ont pas les moyens d'embaucher des professionnels (p. ex., des comptables ou des avocats) pour les aider. Certaines personnes abandonnent parce qu'elles trouvent ce processus trop difficile et décourageant.
    • Le CIPH médicalise le handicap. Il repose sur des évaluations médicales, ce qui crée des obstacles pour les personnes en situation de handicap. De nombreuses personnes ne sont pas à l'aise de partager leurs informations médicales privées avec des étrangers. De nombreuses personnes n'ont pas accès aux médecins en raison de la pénurie de personnel dans tout le pays. Certains médecins refusent de remplir les formulaires de CIPH. La plupart des médecins demandent des honoraires, ce que de nombreuses personnes en situation de handicap ne peuvent pas se permettre. Les déplacements pour se rendre à des rendez-vous médicaux prennent également du temps et coûtent de l'argent, en particulier pour les personnes vivant dans des régions isolées. Le budget 2024 a mobilisé des fonds pour aider les personnes à assumer ces coûts, mais le projet de règlement ne fournit pas de détails sur ce soutien.
    • Certaines personnes ne sont admissibles au CIPH qu'à titre temporaire. Elles doivent présenter une nouvelle demande de CIPH tous les deux ans, ce qui crée davantage d'obstacles.
  • Recommandations :
    • L'utilisation du CIPH pour déterminer l'admissibilité à la PCPH pourrait aider à accélérer la mise en œuvre de ce nouveau programme. Toutefois, étant donné que de nombreuses personnes se heurtent à des obstacles lorsqu'elles veulent accéder au CIPH, il ne devrait s'agir que d'une solution temporaire. Le gouvernement devrait collaborer avec les communautés de personnes en situation de handicap pour trouver un moyen plus inclusif et plus accessible de déterminer l'admissibilité à la PCPH à long terme. Par exemple, les personnes en situation de handicap qui reçoivent d'autres prestations d'invalidité fédérales, provinciales ou territoriales pourraient être automatiquement inscrites à la PCPH.
    • Le gouvernement devrait également poursuivre ses efforts pour rendre le programme de CIPH plus inclusif et plus accessible.

Exclusions

  • Enjeu : La CCDP craint que les critères d'admissibilité énoncés à l'article 2 du projet de règlement n'empêchent certains groupes de personnes en situation de handicap d'accéder à la PCPH.
  • Recommendation : Les critères d'admissibilité à la PCPH doivent être larges et inclusifs afin que le plus grand nombre possible de personnes puissent bénéficier de la PCPH. Il est particulièrement important de veiller à ce que les personnes en situation de handicap qui sont confrontées à des formes intersectionnelles d'oppression et de discrimination puissent accéder à ce programme.

Montant

Montant et calcul

  • Enjeux : La CCDP est très préoccupée par le montant maximal de la PCPH. Le règlement proposé ne permettrait aux personnes en situation de handicap de recevoir un montant maximal de 2 400 $ par an ou 200 $ par mois. Ce montant est nettement insuffisant pour sortir les personnes en situation de handicap de la pauvreté ou assurer leur sécurité financière.

    En novembre 2023, le directeur parlementaire du budget (DPB) a conclu que pour permettre aux personnes en situation de handicap de sortir de la pauvreté, la PCPH devrait se situer entre 14 356 $ et 22 701 $. Les défenseurs des personnes en situation de handicap ont demandé que le montant de la PCPH soit encore plus élevé, compte tenu des coûts supplémentaires liés à la vie d'une personne en situation de handicap.

    Dans le cadre de notre travail de surveillance du droit à un logement adéquat pour les personnes en situation de handicap, nous avons appris que de nombreuses personnes ont actuellement de la difficulté à payer leur loyer et à répondre à leurs besoins fondamentaux. Certaines personnes en situation de handicap se tournent même vers l'aide médicale à mourir (AMM) parce qu'elles estiment qu'elles n'ont pas d'autre choix. C'est inacceptable. Les données que nous avons recueillies montrent que les personnes en situation de handicap sont plus susceptibles de vivre dans un logement inabordable et qu'elles sont presque deux fois plus susceptibles de vivre en situation de besoin impérieux en matière de logement. Le montant de la PCPH doit être suffisamment élevé pour améliorer les conditions de vie des personnes en situation de handicap et leur permettre de vivre dans la dignité. 

    Les seuils de revenus proposés par la PCPH (23 000 $ pour les personnes seules et 32 500 $ pour les couples) et les exemptions de revenu d'activité (10 000 $ pour les personnes seules et 14 000 $ pour les couples) devraient également être augmentés afin d'éliminer les obstacles à l'emploi des personnes en situation de handicap.

    Le projet de règlement ne tient pas compte des fluctuations des revenus des personnes. Par exemple, les personnes ayant un handicap épisodique peuvent travailler dans l'économie à la demande parce qu'elles ont besoin d'horaires de travail flexibles. Si leur revenu n'est pas stable, elles peuvent avoir besoin de versements plus élevés au titre de la PCPH à certaines périodes de l'année.

    En outre, le projet de règlement ne tient pas compte des différences du coût de la vie dans le pays. Par exemple, les personnes vivant dans des villes comme Toronto et Vancouver peuvent avoir besoin de versements plus élevés au titre de la PCPH, car le coût de la vie y est plus élevé. Les personnes vivant dans des régions éloignées ou rurales peuvent avoir besoin d'une aide supplémentaire pour compenser certains obstacles supplémentaires, tels que l'absence de services publics à proximité ou des coûts de transport élevés.
  • Recommandations :
    • Le montant de la PCPH doit être augmenté de manière significative. Ce montant devrait être suffisamment élevé pour sortir les personnes en situation de handicap de la pauvreté, leur garantir un niveau de vie adéquat et leur permettre de vivre dans la dignité. La PCPH doit prendre en compte les coûts supplémentaires liés au fait de vivre avec un handicap, comme l'exige la Loi sur la Prestation canadienne pour les personnes handicapées.
    • Les seuils de revenus de la PCPH et les exemptions de revenus de travail devraient également être augmentés pour éliminer les obstacles à l'emploi.
    • La PCPH devrait tenir compte des différences du coût de la vie dans le pays. Elle doit également s'adapter aux fluctuations des revenus et des besoins financiers des personnes au fil du temps.

Critères du revenu pour les couples

  • Enjeu : Le projet de règlement utilise un critère de revenu du conjoint. Cela signifie que le montant de la PCPH peut être réduit en raison du revenu du conjoint. La CCDP craint que cela ne limite l'autonomie et les choix de vie des personnes. Les personnes en situation de handicap pourraient penser qu'elles ne peuvent pas se marier ou vivre avec leur partenaire parce qu'elles n'ont pas les moyens de voir le montant de leur PCPH réduit.

    L'analyse d'impact du gouvernement reconnaît que le critère du revenu du conjoint amplifie la dépendance financière. Les personnes en situation de handicap sont plus vulnérables aux abus et à l'exploitation si elles sont financièrement dépendantes de leur partenaire. Si les personnes ne sont pas financièrement indépendantes, il peut également être plus difficile pour elles de quitter des situations violentes. Ces risques sont encore plus élevés pour les femmes en situation de handicap et les personnes confrontées à des formes intersectionnelles d'oppression.
  • Recommandation : La PCPH doit être personnalisée pour favoriser l'autonomie, l'indépendance et la sécurité des personnes. Le règlement devrait utiliser un critère de revenu individuel au lieu d'un critère de revenu des conjoints.

Protection contre les dispositions de récupération

  • Enjeu : La CCDP est préoccupée par le fait que le projet de règlement n'empêche pas la récupération (c.-à-d. la réduction) d'autres prestations et mesures de soutien au revenu. Cela signifie que les autres mesures de soutien (p. ex., les prestations fédérales, provinciales et territoriales et les prestations d'une assurance privée) pourraient être réduites en fonction du montant reçu de la PCPH. Cela irait à l'encontre de l'objectif de la PCPH, car la situation financière des personnes en situation de handicap ne s'en trouverait pas améliorée. À ce jour, seuls quelques provinces et territoires se sont engagés à empêcher la récupération d'autres prestations pour les bénéficiaires de la PCPH.

    L'analyse d'impact du gouvernement reconnaît que « les mesures provinciales et territoriales de soutien du revenu sont largement insuffisantes pour répondre aux exigences économiques auxquelles de nombreuses personnes en situation de handicap sont confrontées dans leur vie quotidienne ». Selon le DPB, ces programmes sont en moyenne inférieurs de 40 % au seuil de pauvreté officiel. La PCPH ne doit pas remplacer ces mesures de soutien au revenu. Elle devrait compléter ces mesures, contribuer à combler les écarts de revenus et sortir les personnes en situation de handicap de la pauvreté.
  • Recommandation : Le gouvernement doit veiller à ce que les autres mesures de soutien au revenu ne soient pas récupérées pour les personnes qui reçoivent la PCPH, notamment les autres prestations fédérales, les montants reçus dans le cadre de programmes d'aide sociale provinciaux et territoriaux et les prestations provenant d'assurances privées. Pour atteindre l'objectif de la PCPH, qui est de sortir les personnes en situation de handicap de la pauvreté, il faut absolument s'assurer que ces prestations ne puissent pas être récupérées. La PCPH ne doit pas être considérée comme un revenu lorsqu'il s'agit de déterminer l'admissibilité des personnes à d'autres programmes d'aide ou le montant qu'elles reçoivent de ces programmes.

Processus de demande

  • Enjeu : Le projet de règlement ne fournit pas de détails sur le processus de demande de PCPH. Toutefois, l'analyse d'impact indique que les personnes qui bénéficient actuellement du CIPH n'auront pas à demander la PCPH. Ils seront automatiquement inscrits à la PCPH s'ils atteignent les seuils de revenus fixés par la nouvelle prestation. Les personnes qui ne bénéficient pas actuellement du CIPH devront quant à elles remplir deux demandes distinctes (une pour le CIPH et une pour la PCPH), en plus de leur déclaration d'impôts. La CCDP craint que cela n'entraîne une charge importante pour les personnes en situation de handicap, en particulier pour celles qui sont confrontées à des obstacles dans l'accès au CIPH.
  • Recommandations :
    • Le gouvernement devrait collaborer avec les personnes en situation de handicap pour concevoir et mettre en œuvre un processus de demande de PCPH qui soit simple et accessible. Par exemple, le processus de demande pourrait être simplifié en inscrivant automatiquement les personnes à la PCPH si elles atteignent les seuils de revenus du nouveau programme. Cela permettrait d'alléger le fardeau qui pèse sur les personnes en situation de handicap. Cela permettrait également au gouvernement de commencer les versements de la PCPH plus tôt.
    • Afin d'améliorer l'accessibilité du processus de demande, le gouvernement devrait également fournir une aide gratuite aux personnes qui souhaitent déposer une demande de PCPH.
    • Le gouvernement devrait évaluer l'accessibilité du processus de demande de PCPH sur une base régulière, et ce, en collaboration avec des personnes en situation de handicap. Le gouvernement devrait actualiser le processus de demande, le cas échéant, en fonction des commentaires des personnes en situation de handicap au sujet des obstacles.

Autres questions

Terminologie

  • Enjeu : La Gazette utilise le terme « grave » pour décrire les handicaps. Ce langage médicalise le handicap. Cela renforce également l'idée de « hiérarchie des handicaps », qui laisse entendre que certains handicaps sont « pires » et méritent donc davantage d'être stigmatisés.
  • Recommandation : Au lieu de mettre l'accent sur la gravité des handicaps, la PCPH devrait veiller à supprimer les obstacles financiers qui empêchent les personnes en situation de handicap de vivre dans la dignité et de participer pleinement à la vie de la société. Cette démarche se rapproche davantage du modèle social du handicap, qui est reflété dans la CDPH et la Loi canadienne sur l'accessibilité.

Analyse comparative entre les sexes Plus

  • Enjeu : Le projet de règlement n'aborde pas les obstacles uniques et intersectionnels rencontrés par les différents groupes de personnes en situation de handicap. Par exemple, les personnes vivant dans des établissements, les nouveaux arrivants au Canada et les personnes en situation d'itinérance peuvent rencontrer davantage d'obstacles pour accéder à la PCPH. Les données montrent que les personnes en situation de handicap sont quatre fois plus susceptibles de se retrouver en situation d'itinérance. Ces personnes ne disposent pas toujours d'un compte bancaire, d'une adresse permanente ou de pièces d'identité. Elles peuvent donc avoir besoin d'un soutien plus important pour accéder à la PCPH.
  • Recommandations : Le gouvernement devrait veiller à ce que toutes les personnes en situation de handicap aient un accès égal à la PCPH. Des mesures devraient cibler les personnes en situation de handicap vivant dans des situations de vulnérabilité et les groupes qui sont souvent sous-représentés. Le soutien supplémentaire doit être adapté aux besoins de ces personnes en situation de handicap.

Mesurer l'impact

  • Enjeux : L'analyse d'impact du gouvernement indique que « les données désagrégées seront utilisées pour surveiller l'incidence de la PCPH sur les niveaux de pauvreté chez divers groupes de personnes en situation de handicap à l'aide de l'Enquête canadienne sur l'invalidité » (ECI). Dans le cadre de notre surveillance du droit au logement des personnes en situation de handicap, nous avons découvert d'importantes lacunes dans les données concernant les personnes en situation de handicap qui sont collectées par les enquêtes nationales. Par exemple, l'ECI et l'Enquête canadienne sur le logement (ECL) n'incluent que les personnes vivant dans des résidences privées. Les personnes qui vivent dans des établissements, tels que les foyers de groupe, les prisons et les maisons de soins de longue durée, sont exclues de ces enquêtes. Les personnes en situation d'itinérance sont également exclues. La CCDP est préoccupée par le fait que l'expérience de nombreuses personnes en situation de handicap ne soit pas prise en compte dans ces enquêtes.

    En outre, les données de ces enquêtes ne peuvent pas être entièrement désagrégées. Par exemple, l'ECI et l'ECL n'interrogent pas les personnes sur leur orientation sexuelle ou leur expression de genre. La CCDP craint que cela ne rende difficile d'évaluer l'impact de la PCPH sur certains groupes de personnes en situation de handicap confrontées à des formes intersectionnelles d'oppression et de discrimination.
  • Recommandations :
    • Le gouvernement devrait combler ces lacunes dans les données et veiller à ce que les expériences de toutes les personnes en situation de handicap soient prises en compte dans les enquêtes nationales. Ces données sont essentielles pour pouvoir évaluer pleinement l'incidence de la PCPH sur divers groupes de personnes en situation de handicap.
    • Le programme de la PCPH devrait être mis à jour, le cas échéant, pour remédier aux disparités révélées par l'analyse des données désagrégées.

Suspension des prestations

  • Enjeu : Le paragraphe 13(1) du projet de règlement permettrait au ministre de suspendre les versements de la PCPH d'une personne s'il existait des doutes quant à l'admissibilité de cette personne à la PCPH. Les versements pourraient être suspendus jusqu'à ce que le ministre soit certain que la personne est admissible à la PCPH. La CCDP craint que cela ne mette les personnes en situation de handicap dans une situation financière précaire. Par exemple, certaines personnes pourraient ne pas pouvoir payer leur loyer et d'autres factures à temps si leurs versements au titre de la PCPH étaient suspendus. Elles risqueraient alors de devoir payer des frais de retard ou d'être expulsées de leur logement.
  • Recommandation : Le gouvernement ne doit retenir les versements de la PCPH d'une personne que si des preuves confirment que la personne n'est pas admissible à la PCPH.

Incapacité

  • Enjeux : L'article 18 du projet de règlement permettrait aux représentants d'agir au nom des personnes en situation de handicap qui sont « incapables de gérer leurs propres affaires ». L'article 19 permettrait de verser la PCPH aux représentants des personnes, notamment aux tuteurs et aux curateurs. La CCDP craint que les personnes en situation de handicap ne soient exposées à des abus financiers si des mesures de protection adéquates ne sont pas mises en place.

    La CCDP craint également que le projet de règlement ne prive les personnes en situation de handicap de leur autonomie et de leur capacité juridique par l'entremise de systèmes de prise de décision de substitution. L'article 12 de la CDPH stipule que les personnes en situation de handicap ont droit de « jouir de la capacité juridique sur la base de l'égalité avec les autres » et ont droit au soutien nécessaire pour exercer leur capacité juridique. La réserve conditionnelle du Canada à l'égard de l'article 12 de la CDPH permet de continuer à utiliser des systèmes de prise de décision de substitution. La CCDP est préoccupée par le fait que le Canada n'a guère progressé dans la mise en place de systèmes de prise de décision favorables qui préservent l'autonomie des personnes en situation de handicap.
  • Recommandations :
    • Le gouvernement devrait veiller à ce que des garanties adéquates soient mises en place pour prévenir les abus juridiques et financiers des personnes en situation de handicap qui demandent ou reçoivent la PCPH.
    • Le gouvernement devrait continuer à travailler à la mise en œuvre complète de l'article 12 de la CDPH. Cela nécessiterait une véritable évolution vers une approche de la capacité juridique fondée sur les droits de la personne. Au lieu de priver les personnes en situation de handicap de leur capacité juridique, il faudrait leur fournir les mesures de soutien dont elles ont besoin pour prendre leurs propres décisions.

Conformité et application

a) Obligation de comparaître

  • Enjeu : L'article 36 du projet de règlement permettrait au ministre d'exiger qu'une personne en situation de handicap se présente en personne, ou par audioconférence ou vidéoconférence, pour fournir des informations sur sa demande de PCPH. Cela pourrait créer des obstacles pour certaines personnes en situation de handicap. Par exemple, certaines personnes pourraient être confrontées à des obstacles en matière de transport ou avoir du mal à accéder à Internet ou à un téléphone. Elles pourraient être dans l'impossibilité de s'absenter de leur travail pour cette raison.
  • Recommandation : Les besoins des personnes en matière d'accessibilité et les circonstances individuelles doivent être pris en compte lors de la mise en œuvre de la PCPH. Les activités de conformité et d'application doivent être accessibles et les mesures d'adaptations nécessaires en raison d'un handicap doivent être mises en place.

b) Sanctions administratives pécuniaires et infractions

  • Enjeu : L'article 37 du projet de règlement permettrait d'imposer des sanctions administratives pécuniaires (SAP) aux personnes qui font sciemment des déclarations fausses ou trompeuses. L'article 38 permettrait de punir des personnes pour des infractions sur la base d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire. La CCDP craint que ces actions n'aient de graves conséquences pour les personnes en situation de handicap.
  • Recommandation : Il convient de veiller tout particulièrement à ce que ces actions ne soient utilisées qu'en dernier recours, si une personne a sciemment fourni de fausses informations. Les personnes en situation de handicap ne doivent pas être pénalisées pour avoir commis des erreurs ou fourni involontairement de fausses informations.

Conclusion

La CCDP encourage le gouvernement à poursuivre le développement, la mise en œuvre et la surveillance du programme de la PCPH en collaboration avec les personnes en situation de handicap. L'adoption du principe « Rien sans nous » de la Loi canadienne sur l'accessibilité contribuerait à garantir que le programme de la PCPH est inclusif, accessible et sensible aux besoins des communautés de personnes en situation de handicap. Compte tenu de la nécessité urgente de sortir les personnes en situation de handicap de la pauvreté, le gouvernement devrait commencer à effectuer des versements au titre de la PCPH dès que possible.

La CCDP demande instamment au gouvernement de veiller à ce que la PCPH soit conforme aux engagements pris par le Canada en vertu des lois internationales sur les droits de la personne. Nous accueillerons volontiers d'autres occasions d'apporter notre contribution à ce nouveau programme essentiel.

HR4-130/2025F-PDF
978-0-660-75473-4
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